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Intégration des TICE : chiffres, explications et pistes

DERO M. (2011)
Séminaire TICE Artois "TIC et innovation pédagogique", Faculté des Sciences Appliquées (FSA), Université d’Artois, 10 novembre 2011 - Béthune, France

jeudi 10 novembre 2011, par Moïse Déro

Podcast en ligne

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DERO (2011) Intégration des TICE

Ci-dessous, la structure du diaporama présenté


Intégration des TIC dans l’enseignement : données, explications et pistes

Qui suis-je ?

- Doctorat en psychologie cognitive (Rennes, 1998)
- Ingénieur de recherche en Sciences de l’Information et de la Documentation (UBS, 1998-1999)
- Maître de conférences en psychologie des apprentissages et TIC (IUFM, depuis 1999)

Quelques grandes missions

  • Chef de projet plate-forme et ressources numériques au SEAD de Lille 3 (2001-2005)
    • Co-créateur de la plate-forme libre Enfase (Lille3, IUFM, Paris-Ouest)
  • Directeur adjoint IUFM NPdC, chargé des TIC (2003-2006)
    • Production d’outils et accompagnement, opération « micro-portable formateur », FOAD, C2i2e, projet ENT…
  • Membre du groupe national de travail sur le C2i2e (2003-2007)

Préambule

Une commande initiale pour une conférence avec le sous-titre « motivations à apprendre ? Motivations à enseigner ? », modifiée en « données, explications et pistes » car l’intégration des TIC en enseignement ne se limite pas à la motivation des usagers. Les facteurs sont plus complexes et intriqués. Quelques uns seront présentés ici sans être limitatifs.

Plan d’intervention

  1. Introduction
  2. intégration des TICE
  3. multiplicités des explications
  4. Pistes et leviers d’usages

1. Introduction

  • Des études (et revues) spécialisées nombreuses
    • Les enjeux des TIC, leur essor, leurs impacts sociétaux, organisationnels, pédagogiques (etc), les réalisations concrètes, les modélisations nouvelles sur les usages instrumentés…
  • Développement des TIC
    • Des historiques bien connus, des politiques (souvent trop) ambitieuses, des moyens financiers, une économie des TIC, des choix techniques et déploiement (parfois inadaptés)
  • Mais des résultats très souvent mitigés, un retour sur investissement faible… car la généralisation des usages reste modeste
  • Les rapports sur l’intégration des TICE
    • Des données et des études
      • nombreuses en enseignement scolaire (OCDE, UE, France…)
      • un thème qui devient d’importance en enseignement supérieur (cf. Les 1ères journées scientifiques Pédagogie universitaire numérique, Lyon, 2011)
    • L’impact des TIC est globalement positif
      • Sur l’apprentissage et les apprenants
      • Auprès des enseignants et sur l’enseignement
    • Pourtant, des progrès dans les pratiques enseignantes…
      • irréguliers (Balanskat & al, 2006)
      • ou difficiles à caractériser, des freins à la généralisation (Lepetit &l, 2007)

Des compétences attendues…

  • Des politiques éducatives fluctuantes
    • sur les équipements et les compétences enseignantes attendues (Fenouillet, Déro & Lieury, 2010 ; Chaptal, 2003, 2007)
    • Actuellement
      • l’approche par compétences (nombreux référentiels)
      • l’intégration des TICE dans les disciplines
  • Les compétences TICE « idéales » comprendraient
    • Des savoirs de base en informatique
    • Des savoir-faire incluant une pratique pédagogique centrée sur un scenario utilisant les technologies (Gonzalez, 2007)
  • La question du développement des compétences TICE enseignantes

2. Intégration des TICE

Intégration des TIC dans l’enseignement scolaire

  • Les enseignants européens
    • connaissent les TIC
    • utilisent les TIC pour l’élaboration de leurs cours
      • Ex : UE 89%, France 91%
    • mais intègrent plus lentement les TICE en cours
      • Usage en classe moindre (ex : UE 74,5%, France 65,5%) Balanskat & al., 2006 ; BECTA, 2006 ; European Schoolnet, 2004 ; Karsenti & al., 2005, 2008 ; Swain, 2006
  • Un exemple de constat français
    • « [Une] situation de l’usage des TICE […] difficile à caractériser […], des freins à une généralisation de l’usage des TICE […], de conditions matériels hétérogènes entre les niveaux d’enseignements, les territoires, [et] les établissements »

Lepetit & al. (2007) Rapport d’audit sur la contribution des TIC à la modernisation du système éducatif

Taux d’usages déclarés-dans l’enseignement scolaire

Fréquence d’usage des ordinateurs dans les classes françaises en pourcentage, selon le niveau d’enseignement et l’ancienneté dans la profession (adapté de EC/Empirica 2006)

Obstacles à l’intégration

  • Selon les enseignants français interrogés (EC/Empirica 2006)
    • Le manque d’équipement (63%)
    • Des compétences TICE insuffisantes (33%)
      • Déterminant du niveau d’engagement dans les TICE
    • L’inadaptation des TIC à leurs objets d’enseignement (30%)
    • Scepticisme d’un bénéfice pédagogique à l’utilisation des TIC en classe (22%)
      • Déterminant du niveau d’engagement dans les TICE (Recoupés par Karsenti & al., 2005, 2008 ; Lepetit & al., 2007 ; OCDE, 2004 ; etc.)
  • Dans l’enseignement supérieur
    • Les usages TIC les plus répandus en pédagogie universitaire reflètent une conception encore limitée du média d’apprentissage (Basque, 2005)
    • « les technologies numériques sont intégrées en premier lieu pour améliorer des pratiques usuelles dans l’enseignement supérieur (pratiques magistrales) » (Albero et Dumont, 2002)
    • Réitération persistante technologies  formation (Albero, 2011)
      • « Renouveler toujours plus vite les outils en supposant que les compétences viendront d’elles-mêmes » = supercherie
    • Le temps de la maîtrise de nouveaux gestes pédagogiques
      • Le fruit d’évolutions pédagogiques par paliers et dans la durée (Chaptal, 2007 ; Heutte, 2010)
    • Établissements non « e-matures »
  • Les salles informatiques (OCDE, 2001)
    • Une des raisons majeures du faible usage
    • Elles obligent à un enseignement spécialisé
    • Hors du lieu d’apprentissage et d’enseignement de la classe !
    • Les TIC disponibles en classe-(Hakkarainen & al, 2000)
      • Pour des usages intensifs et pédagogiquement « valables » 
  • Autres freins
    • L’aménagement des horaires
    • ...

Effets de la formation

  • Les futurs enseignants
    • ont le potentiel à utiliser les TIC en classe
    • or les intègrent peu une fois nommés
      • Cox, 2003 ; EC/Empirica, 2006 ; Karsenti, 2004 ; McCrory Wllace, 2004 ; OCDE, 2004, etc.
      • Cf. usages des TICE et ancienneté professionnelle
    • Ont des perceptions complexes et variées sur les TICE (Sime & Priestley, 2005)
  • Effet sur les activités TICE en classe si formation suivie (Karsenti & al, 2005, 2008)
    • Majoré si la formation porte
      • sur des activités restreintes et de qualité en rapport à leurs enseignements et aux apprentissages visés (Barton & Haydn, 2006)
      • sur l’objectivation des choix technologiques et pédagogiques en rapport aux apprentissages mobilisés et évalués (Charlier & al., 2002)

2. Multiplicité des approches explicatives

  • Emprunts théoriques nécessaires à d’autres sciences humaines, sociales, techniques et économiques
    • aux contextes d’analyses et cadres théoriques parfois peu reliés
  • Un choix, non sans difficultés, de quelques théories
    • Centration sur les dimensions explicatives pouvant éclairer la compréhension du faible usage des TICE par les enseignants
  • Approches choisies
    • Le modèle de la diffusion de l’innovation
    • Le modèle de la résistance à l’innovation
    • L’acceptabilité des technologies
    • La motivation
      • Théorie de l’auto-détermination
      • La théorie sociale cognitive : processus vicariant et auto-efficacité

Le modèle de la diffusion de l’innovation

Rogers (1995)

- La diffusion de l’innovation est un processus (long) en plusieurs étapes successives.
- Typologie des usagers potentiels
- Si l’étape de la conviction en la pertinence de l’innovation par les acteurs ne se développe pas, notamment par le relais des pionniers ou des leaders d’opinion, cela peut conduire in fine au rejet de l’adoption de l’innovation.

Le modèle de la résistance à l’innovation

Ram (1987)

La résistance à l’innovation technique peut être importante notamment quand :

- la technologie ne correspond pas au mode de vie de l’usager cible,
- qu’elle comporte pour lui des prises de risques
- ou encore que les possibilités d’essai et de transfert sont trop faibles en regard de l’investissement nécessaire

L’acceptabilité des technologies

Du TAM (Technology Acceptance Model) de (Davis, 1985)

à l’UTAUT (Venkatesh & al. 2003)

Issue d’une perspective ergonomique mais est-elle pertinent en éducation ?

Mallein & Toussaint (1994)

  • Acceptabilité sociale d’une innovation
  • Significations d’usages > qualités techniques ou fonctionnelles
  • un objet pour être adopté doit fournir à son usager du sens, une utilisation positive, une utilité quotidienne ou encore une valeur ajoutée réelle
  • Différents profils utilisateurs, différentes postures face à l’innovation

Schéma intégratif de la motivation

Fenouillet (2008, 2009)

Théorie de l’auto-détermination

Lieury & Fenouillet, 1996 (d’après Deci & Ryan, modèle 1971)

schéma tad1

Attitudes et niveaux de détermination

schéma tad 2

Comportements probables-de la fuite à la rébellion

schéma tad3

La théorie sociale cognitive

Bandura (2002)

  • Agentivité humaine et adaptation au changement dans les environnements numériques sont fortement liées au sentiment d’auto-efficacité
  • En observant d’autres usagers des TIC, il est possible de développer une expérience vicariante
  • Si double incertitude (Heutte, 2008)
    • croyance d’efficacité personnelle pour utiliser les TIC
    • la capacité d’apprentissage
    • —> non-usage (Boukhrane, 2006)

4. Pistes et leviers d’usages dans l’enseignement supérieur

  • Pistes non enseignantes
    • Système d’information
      • ENT plus disponible et réactif, simplifié
      • trop de services n’augmente pas les usages mais la confusion pour les enseignants de niveau moyen avec les TIC
      • Salles de cours « facilitantes » des usages
    • Wifi, vidéoprojecteur ou TBI in situ, classes mobiles… et prises de courant !
    • Rapprocher enseignants et services techniques
      • Service d’aide technique joignable très rapidement (type ARN)
      • Dialogues plus réguliers avec les usagers (y compris étudiants), mais pas qu’avec des technophiles !
  • Pistes enseignants
    • Une pédagogie universitaire (du numérique) à développer en France
    • Formation
      • La demande est moins à des formations « technico-techniques »
      • Qu’à une formation sur des usages pédagogiques
        • D’abord modestes pour ne pas décourager
        • Un vecteur : la formation de formateurs —> C2i2e
    • Accompagnement
      • Sur des projets disciplinaires plutôt collectifs
        • Sur le long court pour qu’ils soient structurants et engageants
        • Avoir un référent technique et/ou un pair
    • Le travail doit se faire dans les collèges disciplinaires entre enseignants d’abord sur des projets pédagogiques

5. Lectures conseillées-pour aller plus loin

- Albero (2010) Une approche sociotechnique des environnements de formation : rationalités, modèles et principes d’action, Education et didactique, 4 (1), pp1-17.

- Fenouillet, Déro & Lieury (2010) Les technologies éducatives in Lieury (dir) Psychologie pour l’enseignant, Dunod, 87-114.

- Viens, Lapage & Karsenti (2010) Vers un changement de cilture en enseignement supérieur, Revue des Sciences de l’Education, 36 (1), 13-23.

- Venkatesh, Morris, Davis & Davis (2003) User Acceptance of Information Technology : Toward a Unified View, MIS Quarterly, 27 (3), 425-478

- Portail PROFETIC www.profetic.org Initiative québécoise pour la pédagogie universitaire numérique